La Propriété de Dana Modan
Projeté au Festival du Cinéma Israélien de Paris.
Le Festival du Cinéma Israélien de Paris revient du 17 au 25 mars 2025 au Cinéma Majestic Passy pour une 25ᵉ édition riche en découvertes.
Depuis un quart de siècle, cet événement incontournable créée par Charles Zrihen, présidé par Hélène Schoumann et sa directrice artistique Armelle Bayou, met en lumière les talents du cinéma israélien, offrant un regard unique sur une société en perpétuelle mutation à travers des œuvres engagées, intimes et puissantes.
Pour cette édition anniversaire, la programmation s’annonce dense : longs-métrages, documentaires, classiques, événements, séries et courts-métrages seront à l’honneur.
Voici la bande-annonce :
LE PODCAST SUR LES MEILLEURS FILMS DU FESTIVAL DU CINÉMA ISRAÉLIEN
La Propriété de Dana Modan
Avec Rivka Michaeli, Sharon Strimban, Andrzej Seweryn, Piotr Pacek
D’après le roman graphique de sa soeur Rutu Modan.
Le film raconte l’histoire de Regina et de sa petite-fille Mika, qui se rendent en Pologne pour récupérer une propriété familiale confisquée pendant la Seconde Guerre mondiale. Cependant, leur quête prend une tournure inattendue lorsque Regina décide soudainement d’abandonner la mission, laissant Mika déconcertée.
Au fil de leur voyage, des secrets enfouis refont surface, notamment la recherche par Regina d’un amour perdu depuis soixante-dix ans.
Un passé qui ne s’efface pas
Le cinéma explore rarement le retour à la terre d’avant la Shoah, et La Propriété, de Dana Modan, s’inscrit dans cette lignée, à l’instar du très réussi A Real Pain de Jesse Eisenberg.
Ici, Varsovie sert de décor à un récit où passé et présent s’entrelacent de manière troublante.
Regina, incarnée avec une intensité bouleversante par Rivka Michaeli, revient en Pologne sous prétexte de récupérer l’appartement familial qu’elle a dû quitter avant la guerre. Mais cette quête immobilière dissimule une blessure plus intime : enceinte d’un Polonais qu’elle aimait, elle avait tenté de fuir avec lui, avant que la police, envoyée par ses propres parents, ne l’arrête.
Séparés de force, lui restant en Pologne, elle envoyée en Palestine avec sa famille, ils ne se sont jamais revus.
Soixante-dix ans plus tard, elle entreprend ce voyage aux allures de pèlerinage aux côtés de sa petite-fille Mika (Sharon Strimban, révélation du film).
Entre mémoire et illusions perdues
Ce retour à Varsovie se transforme vite en une errance dans une ville où le poids de l’histoire se fait omniprésent. La mémoire y est recomposée à des fins touristiques, dans des mises en scène parfois au goût douteux censées capter l’attention des nouvelles générations. L’antisémitisme, loin d’avoir disparu, affleure encore sous des discours faussement bienveillants.
Au cœur de cette ville-miroir, Mika se laisse troubler par un jeune guide polonais, sincèrement attiré par elle. Pourtant, elle perçoit une ambiguïté dans son regard, comme s’il projetait inconsciemment sur elle un rapport plus large à l’histoire juive de son pays. Ce décalage entre son ressenti et les intentions du jeune homme nourrit un trouble subtil, entre fascination et malaise.
Mais peut-on réellement revenir en arrière ?
La quête de Regina se heurte à une vérité qu’elle n’avait peut-être pas anticipée. Comme la ville elle-même, la mémoire familiale ne se laisse pas rouvrir à loisir.
Le film capte avec justesse ce vertige du retour, entre nostalgie et impossibilité de retrouver ce qui a été perdu à jamais.
La Propriété doit aussi sa force à l’interprétation magistrale de ses actrices.
Rivka Michaeli, immense actrice israélienne, insuffle à Regina une émotion brute, tandis que Sharon Strimban, véritable révélation, apporte à Mika une énergie contrastée entre insouciance et gravité.
Leur duo fonctionne à merveille, porté par une alchimie indéniable qui donne à cette quête de mémoire une profondeur universelle.
Un film puissant sur la transmission, l’amour et ces retours impossibles, où l’Histoire, loin d’être figée, continue d’évoluer avec ceux qui la portent.
Projection en présence de la réalisatrice Dana Modan le samedi 22 mars à 16h00.
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