Mission Impossible 8 critique : une fin physique et politique
Mission Impossible 8 critique : avec The Final Reckoning, présenté hors compétition à Cannes, Tom Cruise conclut une saga culte à travers un film à la fois physique, politique et profondément ancré dans notre époque.
Cannes, 14 mai 2025. Hors compétition, Mission: Impossible – The Final Reckoning a été projeté en soirée d’ouverture au Grand Théâtre Lumière. Il n’était pas là pour rivaliser avec les films d’auteur, mais pour affirmer, une dernière fois peut-être, que le cinéma populaire peut encore être une expérience physique, sensorielle, politique. Le film a été accueilli par une ovation de plus de cinq minutes. Tom Cruise, visiblement ému, saluait non seulement la Croisette mais toute une manière de faire du cinéma.
Un récit de la fin : IA, solitude, loyauté
Le pitch est simple, presque programmatique. Ethan Hunt affronte « l’Entité », une intelligence artificielle capable d’infiltrer tous les systèmes numériques, de falsifier les identités, d’effacer la mémoire. Une abstraction totale. Le film ne cède pas à la dystopie, il reste ancré dans le présent : manipulation de données, désinformation, surveillance généralisée. Ethan n’est plus un héros triomphant : il doute, il sacrifie, il s’épuise.
Le scénario n’est pas un prétexte. Il pose une vraie question : que reste-t-il de l’humain quand l’information devient instable, quand la voix, le visage, le corps peuvent être simulés ? Ethan, dans ce contexte, devient une figure sacrificielle. Il lutte non pas pour gagner, mais pour préserver ce qui peut encore l’être. Une poignée de liens. Un geste vrai. Une mémoire intacte.
Une mise en scène à rebours des standards numériques
Christopher McQuarrie, fidèle complice de Cruise, signe une mise en scène qui refuse l’excès numérique. Les cascades sont réelles, les corps engagés. Le fameux saut en moto dans le vide (filmé en Norvège, sans doublure) et la séquence sous-marine (tournée en Afrique du Sud) ne sont pas des démonstrations, mais des épreuves : pour le personnage, pour l’acteur, pour le spectateur.
Chaque plan est pensé pour la salle. Le montage laisse des silences, des respirations. La musique, signée Max Aruj et Alfie Godfrey, déconstruit le thème classique de Lalo Schifrin pour en faire un écho menaçant, fragmenté, hanté.
Le corps de Cruise comme résistance
Tom Cruise, 62 ans, continue de faire ses propres cascades. Et elles sont spectaculaires. Tom n’a peur de rien. Il dit et montre que tout est possible lorsqu’on le contrôle. Le film le montre vieillissant, marqué, mais indomptable. Il ne court plus pour sauver le monde, mais pour échapper à sa disparition. Il incarne une idée : tant que le corps résiste, le cinéma existe. Une idée presque politique, dans une industrie saturée de CGI et de franchises déshumanisées.
Tom Cruise est ici au sommet de son art, parce qu’il assume le doute. Il ne surplombe pas, il chute, il hésite, il regarde ses partenaires avec gravité. Et il écoute. Ce n’est pas un acteur d’action. C’est un acteur tragique.
Ce qui ressort de cette critique de Mission Impossible 8, c’est que Cruise ne cherche pas la perfection mais l’engagement total, jusqu’à l’épuisement.
L’amour du cinéma comme acte de foi
Depuis toujours, Tom Cruise défend le cinéma comme expérience collective. Avec Top Gun: Maverick, il a joué un rôle déterminant dans la relance des salles après la pandémie de Covid-19. Alors que de nombreux studios choisissaient la diffusion en streaming, Cruise a exigé une sortie en salle. Son obstination a payé : le film a dépassé le milliard de dollars au box-office mondial et redonné confiance à toute l’industrie. C’est cette même foi qui irrigue The Final Reckoning — une foi dans le grand écran, dans le souffle du réel, dans l’artisanat spectaculaire. Cruise ne se contente pas de faire du cinéma. Il y croit. Et il se bat pour qu’il survive.
Une saga contre le temps : l’anti-Bond
Lancée en 1996 par Brian De Palma, Mission: Impossible ne s’est jamais contentée d’exister dans l’ombre de James Bond. Là où l’agent 007 se réinvente à chaque génération, Ethan Hunt se construit film après film, sans reboot, sans rupture, sans cynisme. Pas d’ironie british ici, mais une fidélité têtue à l’engagement physique, à l’équipe, à la loyauté.
Là où Bond incarne un empire, Hunt incarne une ligne de fuite. Chaque film de la saga adapte sa grammaire aux époques — thriller paranoïaque, opéra technologique, huis clos émotionnel — mais toujours avec un ancrage dans le réel, dans l’urgence du corps.
Cette Mission Impossible 8 critique met en lumière une saga qui, loin du recyclage, s’est constamment adaptée aux enjeux de son temps.
Tom Cruise : le dernier acteur-monde
À 62 ans, Tom Cruise n’est pas simplement la star d’une franchise : il en est le moteur idéologique, le garant moral, l’artisan obsessionnel. De Risky Business, Top Gun à Eyes Wide Shut, de Né un 4 juillet à Edge of Tomorrow, il a construit une filmographie où la question du corps, du doute et du devoir revient sans cesse.
Sa carrière est un refus permanent de la passivité : il court, il tombe, il saigne. Il dirige ses propres séquences, produit ses films, choisit ses réalisateurs. Et il résiste : aux plateformes, aux effets de mode, aux personnages interchangeables.
Tom Cruise est peut-être le dernier acteur à croire encore au grand récit du cinéma américain. Non comme nostalgie. Mais comme foi dans l’acte filmique.
Les femmes de Mission Impossible 8 : puissantes et multiples
Hayley Atwell, Rebecca Ferguson, Pom Klementieff, Vanessa Kirby, Hannah Waddingham : autant de personnages féminins actifs, jamais cantonnés à la romance ou à la morale. Grace (Atwell) devient le miroir moral d’Ethan. Ilsa Faust (Ferguson) hante le film comme un souvenir brûlant. Paris (Klementieff), muette et animale, impose une présence inédite. Rarement un blockbuster aura offert autant de rôles féminins différenciés, et crédibles.
The Final Reckoning : un seuil, pas une fin
Le dernier acte évite le spectaculaire. Pas d’explosion finale. Pas de discours. Ethan Hunt ne meurt pas. Il disparaît presque. Et Cruise, en filigrane, avec lui. Le film se referme sur une absence. Sur une possibilité : que ce soit la fin.
En cela, cette critique de Mission Impossible 8 révèle un film-testament, où chaque silence compte plus qu’un déluge d’effets spéciaux.
Une saga unique
Depuis 1996, Mission: Impossible a muté à chaque épisode. De Palma, Woo, Abrams, Bird, McQuarrie : autant de variations, de styles, de visions. Mais une seule constante : Tom Cruise comme axe moral, comme moteur cinématographique. Pas de reboot. Pas de recast. Une fidélité rare.
The Final Reckoning est peut-être le point d’orgue de cette aventure. Pas un feu d’artifice. Un requiem. Une épure. Une dernière course, non pour gagner, mais pour affirmer que, malgré tout, le cinéma est encore possible. Pour de vrai. Et pour de bon.
Consulter la fiche du film sur IMDb, ou la présentation officielle sur le site du Festival de Cannes, suivez les liens.
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